Le talent au féminin. Interview d’Alice Hubert, la papesse du bijou pop.

Nous sommes le 19 Juillet, une fin d’après-midi encore bien chaude. Je pars rejoindre Alice dans sa boutique-atelier au passage du Caire, numéro 97, chiffre du rêve et de l’imaginaire. Alice m’ouvre la porte de son cabinet de curiosités où ses bijoux pop, colorés et assumés cohabitent avec des meubles de design parfaitement chinés. C’est en passant cette porte que je suis entrée dans l’incroyable univers d’Alice pour parler création, rêves, réseaux sociaux, inspiration et liberté. À mon tour maintenant de vous inviter à franchir ce pas à travers cette interview pour découvrir une femme incroyablement talentueuse et audacieuse, délicieusement sincère et authentique.
Emma Paris vous livre ici la première interview de la série « Le talent au féminin » : une vraie dose d’inspiration de femmes qui vivent leur vie avec passion.

Hello Alice. Racontes-moi, qui es tu ? Qu’est ce qui te fais vibrer ?  

Je suis Alice Hubert, créatrice de bijoux. Mon métier me définit beaucoup car je le fais par passion. Avant je passais mes journées dans mon atelier avant de me transformer en oiseau de nuit. Maintenant avec ma vie de famille c’est un peu plus compartimenté mais c’est toujours comme ça que je me définis.

Ce qui me fait vibrer ? La lumière, la couleur, la musique, le partage, les jolies choses.

Aujourd’hui tu es créatrice de bijoux. Est-ce que tu as toujours voulu faire ce métier ? 

Enfant je voulais être archéologue pour trouver des trésors. Et puis dans un magazine d’été, j’avais vu sur une carte tous les trésors déjà trouvés. Je me suis dit qu’il n’y avait plus de trésors à découvrir. Je me souviens de ma déception. Alors je me suis dit « Je vais créer des trésors ».
Petite déjà je bidouillais, je créais. Mes parents m’ont toujours encouragée dans le processus créatif. Je suivais des cours de dessin, de modelage. Mon père faisait de la peinture, je me rappelle encore de l’odeur de térébenthine chez lui. Ma mère était très sensible à la musique, il y en avait toujours à la maison : j’ai grandi avec ces influences. 

On m’a dit qu’il n’y avait plus de trésors à découvrir, alors je me suis dit que j’allais les créer.

Et puis la bijouterie fantaisie est venue à moi. Ce que j’adore, c’est que tu pars d’une matière à priori moins noble que l’or ou les diamants, et c’est tout le travail de cette matière qui va le rendre précieux. L’alchimie, le processus d’un métal brut qui devient précieux. 

Quel parcours as-tu suivi pour faire de ta passion ton métier ?

J’ai choisi de faire l’école Boulle qui à l’époque était uniquement une école de design, pas de bijoux. Pour mon examen de sortie j’ai d’ailleurs dû me battre avec mes profs car je voulais réaliser un bijou de corps et ils ne voulaient pas car ce n’était pas dans la ligne « design » de l’école. Au final j’ai été majore de ma promotion !
C’est un truc qui m’a fasciné chez Alice : sa confiance et sa détermination.

Mon copain de l’époque était dans cette école avant que j’y rentre. Quand j’allais le chercher je regardais comme une petite souris les ateliers et puis un jour j’y suis rentrée pour suivre une formation de ciseleuse – c’est le travail du métal. J’ai aussi appris la technique de la cire.

Alice m’a fait une démonstration technique et je vous encourage à aller la suivre sur les réseaux sociaux car elle explique tout ça en image.

Quand je suis sortie de Boulle, j’étais maquettiste. J’ai bossé pour plusieurs créateurs. En même temps, pendant 3 ans, je prenais des cours du soir au lycée de la bijouterie Nicolas Flamel. J’y ai appris la bijouterie, le serti, l’émaillage et la gemmologie.
D’ailleurs pour l’histoire, aujourd’hui l’école Boulle et Nicolas Flamel ont fusionné pour proposer un diplôme de bijouterie complet.
Alice ne s’arrête jamais d’apprendre c’est dingue !

Comment es-tu arrivée à créer ta propre marque de bijoux ?

Au départ, je voulais bosser dans la haute couture. Mon rêve c’était de faire des bijoux de défilés, des pièces spectaculaires. Mais ma formation était loin de celle de styliste recherchée par les maisons de luxe. De cette porte fermée, j’me suis dit « Ok je vais faire mes propres créations pour montrer de quoi je suis capable et ça me permettra de démarcher ensuite. »
Nous sommes en 1999, Alice a 22 ans à ce moment là. On en revient à la détermination et au fait de croire en soi, en son talent...

Un copain un jour m’emmène chez Franck et Fils. Pour ceux qui comme moi ne connaissent pas, c’était une grande enseigne de l’époque comme les Galeries Lafayette.

Il me présente une acheteuse bijou très influente qui a aimé mes collections. J’ai ensuite été vendue là-bas. Et puis il y a eu un effet boule de neige. Les choses ont vite décollé. Les journalistes ont ensuite relayé mes collections. J’ai été vendue dans plusieurs endroits à Paris en province et dans le monde.

Comment as-tu fait pour faire évoluer ta marque avec l’arrivée des réseaux sociaux ?

Avec les réseaux sociaux le marché a complètement changé. Quand j’ai commencé, pour marcher il fallait être repéré par des journalistes qui allaient te publier. J’ai aussi eu la chance d’avoir beaucoup d’actrices qui ont porté mes bijoux.

Dès que les réseaux sociaux sont arrivés je me suis engouffrée dedans. Ça te permet de parler de toi à un cercle beaucoup plus large. Et de manière plus directe. Aujourd’hui tout le monde est au même niveau, ce que je trouve génial et à la fois tu dois te démarquer et te challenger constamment dans un domaine qui n’est pas ta spécialité. Et beaucoup d’artistes sont confrontés à ça aujourd’hui. Il faut être multi-tâches. Au moment où j ai eu ma fille, j’étais moins là. Mon énergie était déplacée vers elle et j’ai vu les choses dégringoler. J’ai douté parfois car l’entrepreunariat c’est très dur mais le destin s’est toujours chargé de me montrer que j’étais à ma place en créant des bijoux. 

Qu’est-ce qui habite ta création, qu’est-ce-que tu veux faire passer à travers ton art ?

Quand une femme met du rouge à lèvres, qu’elle se maquille ou peu importe le rituel, elle entre dans un état qui n’est pas le même, elle se sent autrement alors forcément elle dégage une nouvelle énergie. Quand je crée mes bijoux je recherche ce même état. Pour que quand les femmes les portent, elles entrent dans cet état de séduction et qu’elles soient sûres d’elles. 

Mes bijoux sont des jeux pour séduire. Quand tu les portent les gens interagissent avec toi. (Véridique). Mes bijoux créent aussi une connexion, ils sont un vecteur. Ils sont chargés d’une énergie qui crée du lien. Tout ça j’en parle parce que j’ai du recul mais au début je ne l’ai pas fait consciemment.

Mes bijoux créent aussi une connexion, ils sont chargés d’une énergie qui crée du lien.

Comment est-ce que tu penses et construis tes collections ?

Je m’inspire beaucoup de ma vie, des personnes autour de moi, en terrasse de café. 
Pour la collection Les injurieuses par exemple, j’avais 25 ans, et je clôturais une relation de 10 ans avec mon ex. Je découvrais ce que c’était que séduire. Et là je m’étais dit quand t’es un mec et que tu collectionnes les conquêtes t’es un don Juan mais si tu es une femme et que tu fais la même chose, tu es une salope. Alors cette collection est née avec un collier pour moi où il était écrit salope, comme pour montrer que j’assumais mes actes. Si ça posait un problème à qui que ce soit c’était pareil.

Avec la libération de la parole et notamment sur les réseaux sociaux, est-ce que tu penses que ça évolue positivement ?

Aujourd’hui je marche un peu sur des œufs parce que d’une part le discours se libère mais d’autre part il y a du politiquement correct qui bloque beaucoup de choses. Je ne suis pas sûre que les filles de 25 ans aujourd’hui soient plus libres qu’on ne l’était à leur âge. Et puis il y a un décalage constant entre ce que tu dis et ce que tu fais. Il faut se montrer continuellement sous son meilleur jour. Après ce que je trouve vraiment génial c’est que depuis 2-3 ans on a une émergence des différences qui fait un bien fou. Dans les canons de beautés notamment. Le site de Rihanna pour sa marque de lingerie, c’est un vrai kiff. SAVAGEXFENTY.  

Ce qu’il est important de se rappeler, c’est que quand tu es en phase avec toi même, que ce soit avec des poils sous les bras ou sans, avec le crâne rasé ou une superbe mise en plis, quand tu es bien avec toi même, tu trouveras en face des personnes qui te correspondent.  

On va dresser ton portrait chinois maintenant

Si tu étais :

? une couleur : aaah je ne peux pas en choisir qu’une, je choisis l’arc-en-ciel 
? un animal : un chat ou une panthère 
? un élément : le métal et le feu car c’est ce dont j’ai besoin pour créer. D’ailleurs mon signe astrologique chinois c’est serpent de feu ! ??

Un mantra qui t’accompagne tous les jours ?

Il y en a 2.

« Ce qui ne te tue pas te rend plus fort » : vivre des choses difficiles, un échec pro ou autre, si ça ne te tue pas, alors tu as forcément quelque chose à apprendre de tes erreurs .

« S’il y a un problème, il y’ a une solution. S’il n’y a pas de solutions, c’est qu’il n’y a pas de problème »  C’est une phrase qu’un médecin homéopathe m’avait dite petite. À un moment donné, si tu ne trouves pas de solutions, c’est qu’il faut accepter les choses telles qu’elles sont.

Chez Emma Paris on invite les gens à prendre du temps pour eux. As-tu toi un moment ressource dans ton emploi du temps ?

Depuis pas très longtemps on a acheté avec mon chéri une petite maison de campagne sur une petite île sur la Seine pas très loin de Paris. Il n’y a que quelques cabanes, pas de voiture, tu y vas en bateau. Cet endroit est chargé car il a une histoire particulière pour moi. Quand tu reviens tu es délassée. Un jour j’irai créer là-bas. 

L’interview touche à sa fin, peux-tu nous dire quels sont tes projets à venir ?

Cet hiver je vais lancer ma première ligne en métal précieux : argent plaqué or et or. Il y aura des colliers, des bracelets et des bagues. C’est un gros changement pour moi.

Le mot de la fin ?

Fin et suite

Retrouvez Alice dans son atelier boutique au 97 Passage du Caire ou sur internet alicehubert.com et bientôt lors d’une vente privée en exclusivité pour les membres d’Emma Paris.

On espère que cette interview vous aura autant inspiré que nous.
Prenez-soin de vous et vivez vos rêves !

Manon, freelance conceptrice-rédactrice et communication digitale

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